Totalement disparu du territoire français dans les années 1930, le loup est réapparu en 1992. Il occupe aujourd’hui plus de 156 zones de présence permanente en France et exerce une pression de prédation intense sur l’élevage pastoral. En montagne et en plaines où coexistent éleveurs et grands prédateurs, le recours aux chiens de protection est devenu indispensable pour préserver l’activité pastorale. Dévoués à la sécurité du troupeau, les patous et autres chiens de protection font désormais partie du paysage de nos montagnes. Leur comportement diffère des chiens de compagnie : ils ne sont pas dressés pour être agressifs mais leur stature impressionnante et leur instinct territorial les rendent naturellement dissuasifs. Si vous les rencontrez en excursion, quels sont les bons réflexes à adopter ? Que l’on soit randonneur, cycliste ou coureur, il s’agit avant tout de contourner le troupeau et de montrer patte blanche…
Les chiens de protection ne sont pas des chiens comme les autres !
À l’approche d’un pâturage, il vous est sûrement arrivé d’apercevoir des troupeaux escortés de chiens corpulents aux aboiements puissants. Si le patou est le plus connu d’entre eux, d’autres races de chiens de protection ont été patiemment sélectionnées au fil du temps pour leur nature vigilante : citons par exemple le berger de la Maremme et des Abruzzes, le Kangal ou encore le Cão de Gado Transmontano. Leur taille considérable et leur ossature solide les rendent très adaptés pour protéger les animaux d’élevage, en particulier contre les attaques de loups et d’ours. Il est vrai qu’une rencontre avec un chien de protection de troupeaux peut être déroutante. Mais pour qu’elle ne soit pas un problème, il convient tout d’abord de comprendre le tempérament et le rôle de ces formidables auxiliaires de travail.
Qu’est-ce qu’un chien de protection de troupeaux ?
Les patous et autres chiens de protection sont indispensables aux bergers et aux éleveurs : depuis le retour du loup en France, ils représentent un des moyens les plus efficaces pour déjouer les stratégies des prédateurs, et réduire la fréquence et l’impact des attaques sur le troupeau.
Ils sont conditionnés pour vivre avec le troupeau : les chiens de protection considèrent le troupeau comme leur famille. Introduits dès leur plus jeune âge auprès des animaux d’élevage, ils développent un lien de protection instinctif et indéfectible. Ils veillent sur le troupeau sans relâche, nuit et jour même quand l’éleveur ou le berger n’est pas là.
Protéger le troupeau est leur seule raison d’être : d’un naturel placide et patient, les chiens de protection sont autonomes. Contrairement aux chiens de conduite qui reçoivent les ordres de leur maître, les chiens de protection prennent leurs propres décisions. En cas de menace sur le troupeau, ils donnent l’alerte et adoptent une posture d’intimidation. Leurs aboiements servent alors à tenir en respect l’intrus. Mais en cas de menace avérée, notamment lors d’une attaque de loups, ils peuvent aller jusqu’à l’affrontement.
Les chiens de protection de troupeaux sont sensibles à la fatigue et au stress : en contexte de prédation, les chiens de protection s’exposent à des situations dangereuses qui leur coûtent beaucoup d’énergie. Leur vigilance est mise à l’épreuve jour et nuit. L’irruption d’un chien non tenu en laisse, d’un promeneur ou d’un VTT perturbe la bonne marche du troupeau et le travail du berger. Elle met les chiens de protection en alerte, jusqu’à plusieurs centaines de fois par jour. Le seuil de tolérance des chiens de protection de troupeau est alors durement éprouvé. Et face à des intrusions anodines, leur capacité à gérer la pression peut parfois être altérée.
Le comportement normal et prévisible des chiens de protection de troupeaux
Les chiens de protection aboient : leur instinct leur dicte de dissuader tout éventuel intrus, qu’il s’agisse d’un loup, d’un animal sauvage ou d’un promeneur. Ainsi, lorsqu’ils identifient une éventuelle menace à proximité du troupeau, les chiens de protection vont aboyer de façon forte et constante pour donner l’alerte. Bien qu’impressionnants, ces aboiements n’ont pas caractère d’agression.
Ils s’approchent de l’intrus : un évènement les interpelle ? Les chiens de protection vont courir vers leur cible pour faire front et s’interposer. Par leur attitude défensive, ils cherchent à décourager l’intrus de pénétrer dans le périmètre du troupeau.
Ils identifient la nature de la menace : leur vue lointaine étant imprécise de jour, les chiens de protection ont besoin de s’approcher de près pour flairer et analyser l’objet de leur inquiétude. Pour que les chiens de protection se calment et retournent rapidement au troupeau, il est donc nécessaire d’adopter un comportement calme et prudent.
Comment réagir face aux chiens de protection de troupeaux : la bonne attitude à adopter
D’une stature imposante, les chiens de protection de troupeaux sont impressionnants et bruyants. Face à eux, un randonneur ou un cycliste ne sait pas toujours comment se comporter. Pour ne pas rester démuni et subir la rencontre, quelques règles d’or sont à connaître.
• À l’approche d’un troupeau, je garde mes distances : je contourne très largement le troupeau et quitte le sentier principal si besoin. Je parle distinctement, sans crier, pour me signaler.
• Lorsque les chiens de protection viennent à ma rencontre, je m’arrête : je ne force pas le passage. Je ne cours pas pour ne pas inciter les chiens à me poursuivre. Je les laisse s’approcher pour m’identifier et évaluer la situation. J’ôte mes lunettes et casquette pour faciliter la reconnaissance. Je place mon sac-à-dos ou mon VTT devant moi, pour poser une limite.
• Je reste calme et passif : j’évite les gestes brusques et je ne crie pas. Je ne menace pas les chiens de protection avec un bâton ou des pierres. Si je suis à vélo, j’en descends et je marche lentement à côté. Je ne défie pas les chiens en les regardant droit dans les yeux. Je ne leur tourne pas le dos. Je leur parle doucement pour les rassurer.
• Je ne prends aucune initiative qui pourrait inquiéter les chiens de protection : je ne tente pas de les caresser, de les prendre en photo ou de les nourrir. Ces gestes anodins pourraient être interprétés comme des tentatives d’agression à l’égard du troupeau.
→ Si je suis en présence d'autres personnes : je reste avec le groupe.
→ Si mon chien domestique m’accompagne : les interactions entre chiens de protection de troupeaux et chiens de compagnie peuvent être tendues. Pour ma sécurité et celle de mon chien, il est préférable de ne pas l’emmener avec moi en montagne, à proximité des zones de pâturage. À défaut, je le tiens en laisse. En cas de conflit, je lâche la laisse pour permettre aux chiens d’instaurer naturellement une relation dominant/dominé. Je ne m’interpose pas. Je ne prends pas mon chien dans les bras.
→ Si les chiens de protection de troupeau ne relâchent pas la pression : je patiente ou j’envisage de faire demi-tour.
Pour que pastoralisme et tourisme cohabitent : mieux concilier les usages de la montagne
Le pastoralisme de montagne joue un rôle prépondérant dans la préservation de la biodiversité, la conservation des paysages naturels et la protection des écosystèmes montagnards. En tant que modèle agricole traditionnel, il contribue également à maintenir des traditions ancestrales. La montagne n’est donc pas seulement un espace de tourisme, de loisirs et de sports de nature. Rappelons-nous que c’est aussi un espace de travail, qui requiert le respect. En préservant la quiétude des troupeaux et en adoptant les bonnes conduites à proximité des alpages, vous aidez les éleveurs et bergers à maintenir leur activité. Amis randonneurs, coureurs et vététistes : pour votre sécurité, évitez le plus possible les zones d’élevage et soyez attentifs aux indications données par les panneaux d’informations. Préparez votre itinéraire avec l’aide des offices de tourisme locaux ou des applications de randonnée. Astuce en plus : la carte interactive Map Patou localise les alpages et estives gardés par des chiens de protection de troupeaux, dans 9 départements !
Mon métier : réduire la vulnérabilité des élevages face au loup et aux grands prédateurs
Éleveur et berger transhumant, je connais les enjeux et les difficultés qui pèsent sur l’activité pastorale depuis le retour du loup et des grands carnivores en France. À travers mon activité Cistole, j’apporte mon expérience de terrain aux éleveurs, bergers et acteurs territoriaux qui souhaitent améliorer et ajuster la protection des troupeaux face au risque de prédation. Contactez-moi !